Faut-il décrire L’Atelier du peintre, dépeindre les secrets d’une oeuvre, plutôt que simplement la contempler, coi ? Avec quelle plume raconter à la fois l’exubérance et la légèreté vol-planante du dernier spectacle du Cirque Plume ?
Mettre des mots sur le beau, le visuel, le poétique qui ont enchanté et suspendu un millier de spectateurs, dès la représentation de mardi soir, au pôle Phoenix qui porte bien son nom. Pour dire aux autres spectateurs en puissance, qu’il reste six soirées pour s’en prendre plein les yeux et l’âme. Qu’il faut qu’ils courent voir ces artistes volants, ces as du " volant ".
Valse des décors
Le cirque Plume n’est décidément pas comme les autres. Astucieuse en diable dans cette 9 e création qui tourne depuis un an déjà, la troupe de Franche-Comté parvient toujours à surprendre. Elle revisite ici certains tableaux de maîtres. Mieux, elle les fait vivre avec d’incroyables effets visuels laissant pantois et amouraché le visiteur du " musée ". Elle rend souple des sculptures de marbre dont les étreintes semblent ne laisser derrière elle que poussière de craie sur le sol. Elle se joue des ombres et de la lumière, des clairs et des obscurs. Et comme tout poète qui se respecte, en appelle à la lune. Oh pas pour la décrocher, non. Juste la faire sourire ou jongler dessus...
Ici pas de nez rouge, ou alors à la gouache... atelier peinturluresque oblige. Mais petits et grands se bidonnent à voir un trublion s’échiner à attraper une fleur. Face à une toile de tableau fendue (à la Fontana) servant de sortie impromptue ou aux " guerriers " peignant au paint-ball et à la TNT.
Les décors valsent. Les musiciens se jouent de tout, de morceaux de verre, de balles, de mannequins-percussions, mais jamais de nous. Parce que ce cirque-là nous prend par la main pour nous montrer tant de choses. Qu’il ne suffit pas d’une sangle pour atteindre les hauteurs mais aussi de bras encourageants à n’en plus finir. Qu’une trapéziste prise dans une toile d’araignée, après tout, allez savoir si ça n’est pas un cocon protecteur... Que l’on peut trampoliner sur un lit de pétales carmin et, qu’à ce moment-là, notre ombre dansante, aérienne elle aussi, est comme notre âme-soeur. " Arrête de faire l’aveugle, regarde le monde ", prévenait l’un des personnages au début du spectacle. S’il tournait aussi joliment que celui de Plume, qu’il serait beau !
Sylvie RIBOT