Culture Cirque11 octobre 2018
L’heure de la joie
C’est une étrange sensation qui se dégage du public. Une sorte d’excitation, de sérénité, mêlée à une douce nostalgie. Car le Cirque Plume, dont le public revendique une fidélité inconditionnée, présente actuellement à Paris son spectacle d’adieu. Cette 8ème fois à La Villette sera la dernière. Beaucoup ne veulent pas y croire. Certains préfèrent ne pas en parler. L’heure est à la joie, à la poésie, à l’irrésistible. Pour cette dernière saison, la compagnie accueille le public sur ses terres jurassiennes. Tableau après tableau, l’intensité de cette sublime forêt, gorgée d’onirisme autant que de réalisme, irrigue le public de douces respirations artistiques. Chaque personnage est attachant, mystérieux. Une tribu minimaliste qui s’apprivoise au fil des saisons, comme des explorateurs d’un monde maîtrisé. De prouesse en prouesse, chacun se faufile d’un branchage à un autre, profitant de chaque instant pour placer quelques délicieux pas de danse au milieu des feuilles qui jonchent le sol. Notre coup de coeur ira incontestablement à ce numéro d’anneau aérien, brillamment interprété par Analia Serenelli. Véritable Tarzanne Jurassienne, elle interprète un solo aérien à géométrie variable d’une très haute technicité, en union totale avec la nature qui l’entoure. Des figures qui fusionnent si parfaitement, qu’on croirait n’en avoir vue qu’une. Conquis également par Anaëlle Molinario qui, au delà de présenter une contorsion recherchée, offre au public une séquence hilarante dont on ne s’est toujours pas remis. Et pour le reste, du talent et rien que du talent : fil, acrobatie, mât chinois, le spectacle affiche un casting sans faille. Alors à qui donner la parole ? Car tout le monde la mériterait. Nous avons tranché, ça sera Cyril Casmèze. Artiste zoomorphe. Oui, zoomorphe. C’est ainsi qu’il est présenté dans le dossier de la compagnie. Nous avions dans notre besace beaucoup d’autres qualificatifs : épatant, surprenant, bestial ou hilarant. Mais nous resterons sur zoomorphe. Son talent est unique, totalement incroyable. Si certains expliqueront qu’il imite les animaux à la perfection, nous aurions tendance à dire qu’il ne les imite pas, justement. Fascinant. Tout simplement fascinant.
► Cyril Casmèze, artiste zoomorphe dans « La dernière saison », a répondu à la flash-interview de Culture Cirque.
Culture Cirque - Bonjour Cyril. Le Cirque Plume est l’une des rares compagnies à avoir fait l’unanimité à chaque spectacle. Quel est l’ingrédient miracle qui rend selon toi son univers si extraordinaire ?
Cyril Casmèze - C’est à chaque fois un beau travail d’équipe, avec un vrai partage de compétences et un profond, authentique et joyeux mélange des genres. Avec cette chance depuis quelques années d’avoir un temps de création confortable. Et certainement un vrai “esprit Plume” qui perdure, et n’est pas allé se fourvoyer dans divers effets de mode.
Culture Cirque - Un artiste « zoomorphe », ça veut dire quoi précisément ?
Cyril Casmèze - Je préfère l’expression : “Performer Zoomorphe”, sinon plus couramment, je suis comédien acrobate. Mais un artiste Zoomorphe pourquoi pas, ne renions pas ce qui est... Donc Zoomorphe : qui prend la forme des animaux... incarner cette variation infinie de formes, de couleurs, de mouvements et de comportements que nous offre le monde animal non humain... Pour espérons-le, nous parler de l’humain, ou du vivant tout simplement.
Culture Cirque - De quels animaux t’inspires-tu le plus ?
Cyril Casmèze - Ours, Cheval, Sanglier, Grands singes et Écureuil pourquoi pas.
Culture Cirque - Comment as-tu travaillé l’intégration de ton personnage dans « La dernière saison » ?
Cyril Casmèze - J’avais quelques envies et préoccupations de départ dont je m’étais entretenu avec le directeur artistique de la Cie, Bernard Kudlak, et en fonction de ce qui naissait sur scène, ou des numéros présentés ou des tableaux pré-écrits par Bernard Kudlak, j’essayais et proposais des scènes ou des situations, jusqu’à ce que cela devienne ou non pertinent.
Culture Cirque - Cyril, un dernier mot avant que l’aventure Cirque Plume s’achève. Quel sera-t-il ?
Cyril Casmèze - Pour ma part, je comprends que les choses s’arrêtent un jour ou l’autre. Alors oui, c’est un peu triste qu’une telle aventure qui a fidélisé autant de spectateurs se finisse, mais cela restera dans les cœurs et les mémoires, pour ne pas dire dans quelques manuscrits et les artistes qui ont participé à cette aventure iront en rejoindre d’autres. Telle est l’essence de ce métier non ?
« La dernière saison » par le Cirque Plume. Actuellement à La Villette, puis en tournée dans toute la France.
Rédaction : Antoine Cortel Crédit Photo : Benoit Dochy