IL SE PASSE quoi dans un atelier de peintre en l’absence du maître des lieux ? Beaucoup de choses, tour à tour drôles, poétiques, virtuoses, cocasses et absurdes. Avec son nouveau spectacle baptisé L’Atelier du peintre, le mythique cirque Plume, fondé il y a vingt cinq ans à Besançon, explore la psyché du créateur, ses premiers chocs artistiques, ses doutes, ses fulgurances, le monde de l’art et ses impostures (avec des pics pour l’art contemporain). Sur scène, tous les arts du cirque sont représentés : clowns drôles et touchants (mais sans nez rouge), sangles aériennes, acrobaties au sol, jonglages, roue allemande... Au sol, les tableaux s’enchaînent, une petite humanité s’anime au rythme d’une musique aux effluves jazz et tziganes jouée par un groupe en live. On voit La Grande Odalisque d’Ingres prendre vie à la vue d’un acrobate, une statue de marbre s’animer pour une danse lascive ou un riche collectionneur débourser des fortunes pour une croûte conceptuelle...
Dans ce joyeux fourre-tout, surgissent de purs instants de grâce comme cette danseuse sur un trampoline recouvert de pétales rouges. Mis en scène par Bernard Kudlak, le spectacle alterne mélancolie et drôlerie, virtuosité des saltimbanques et maladresse des clowns, trouvailles visuelles comme ces peintures sur ombres chinoises... On regrettera juste la lourdeur de certaines scènes burlesques trop souvent poussives et prévisibles. Sans égaler l’inventivité de son précédent spectacle Plic Ploc, la neuvième création du cirque Plume confirme son talent pour créer d’authentiques moments de magie où la prouesse technique sert le propos poétique.
Eric Mandel